Le volcan iranien, éruption ou explosion ?

Le volcan iranien, éruption ou explosion ?

Depuis la guerre des 12 jours et les jeux de négociations autour du nucléaire, l’attention a été attirée sur les aspects internationaux de la situation iranienne. Il s’y ajoute ce qui pourraient s’apparenter à une phase d’ultimes négociations concernant la libération d’otages français. Mais la situation intérieure demeure le cadre clé de la pérennité du régime. Les facteurs de déstabilisation s’accroissent, politiques, économiques et sociétaux. Le pouvoir accroit la répression espérant éviter l’explosion.

Les factions au sein du parlement iranien se sont déjà affrontées sur l’application des textes sur le port du voile. Le président de la République, Massoud Pezeshkian, n’a pas souhaité de contrôle strict afin d’éviter de nouveaux désordres sociaux. Les cercles proches du Guide Suprême s’étaient opposés à un tel choix, craignant de montrer un signe de faiblesse. Ces querelles s’étendent maintenant au sujet ultra-sensible du dossier nucléaire.

Discorde autour du programme nucléaire

Députés radicaux, religieux, et plusieurs institutions proches du régime, se sont opposés au ministre des Affaires étrangères Abbas Araghchi au sujet du récent accord signé avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Cette opposition a revêtu plusieurs formes, menaces de destitution du ministre, appels au retrait du Traité de Non-Prolifération (TNP) et même un plaidoyer en faveur de la construction d’une bombe nucléaire…
En  effet, le 12 septembre 2025, Kamran Ghazanfari, député lié au CGRI (Gardiens de la Révolution) a ouvertement menacé de destituer le ministre des affaires étrangères, s’il ne divulguait pas le nouveau texte concernant l’inspection des installations nucléaires.

Soixante et onze députés ont même exigé une réunion d’urgence avec le ministre des affaires étrangères, Abbas Araghtchi et le Conseil suprême de sécurité nationale, concernant de possibles concessions mettant en danger les experts nucléaires, ou restreignant les « droits de l’Iran ».

Le programme nucléaire, domaine réservé du Guide suprême, entre donc dans les sujets d’affrontement au sein du pouvoir. Ces fissures internes s’ajoutent à la fracture entre le pouvoir et le peuple

Manifestations et grèves permanentes

Peu d’informations et d’images des mouvements sociaux, journaliers en Iran, sont diffusées. Pourtant le pays fait face à de nombreux mécontentements et manifestations. Les retraités voient leur pension fondre avec une inflation annuelle de plus de 30% ces deux dernières années. Ce taux pourrait approcher 40% en fin d’année, le plus élevé des pays du Moyen Orient. Les fonctionnaires, particulièrement dans l’éducation et la santé, manifestent régulièrement, pour exprimer leur colère vis-à-vis des retards de salaire.

Toutes les provinces connaissent ces mouvements. Depuis le mois de mai, les agitations sociales sont particulièrement marquées dans le Khouzistan, le Baloutchistan, le Kurdistan et la province d’Ispahan. Elles concernent des secteurs industriels variés, sidérurgie, textile, télécommunication, énergie, et portent autant sur les difficiles conditions de travail que sur les salaires. A cela s’ajoute les très nombreuses coupures de courant, et les difficultés d’approvisionnement en eau, liées à la sécheresse et à l’absence d’entretien des réseaux de distribution.

Ce cumul d’insatisfactions conduit à une politisation grandissante des slogans. « A bas le dictateur » est de plus en plus entendu. Les syndicats étant interdits, ou fortement réprimés, d’autres structures sont nées.

Les Unités de Résistance

Depuis quelques années, une nouvelle structure est apparue. Ce mouvement, né au début de cette décennie, porte le nom d’Unités de Résistance. Il a été lancé et il dépend de l’OMPI, Organisation des Moudjahidines (combattants) du Peuple Iranien, dont la création remonte aux années 1960, en opposition au régime du Shah. Ces Unités de Résistance, présentes sur l’ensemble du territoire iranien, atteindraient le nombre de 5.000, mobilisant chacune un petit groupe de volontaires. Selon l’OMPI, ces dizaines de milliers de résistants, sont issus de toutes les classes sociales, et regroupent hommes et femmes de tout âge.
Chaque nuit des dizaines d’opérations sont menées, affichage, destruction des portraits des dirigeants du régime, ou attaques au cocktail molotov de bâtiments officiels. Des centaines de vidéos de ces opérations sont disponibles sur internet, matérialisant leur réalité.
L’action de ces Unités de Résistance, appuyées sur une organisation connue pour son hostilité au régime, explique que ce dernier considère l’OMPI comme son principal adversaire. Le guide suprême ne voulant prononcer leur nom, les appelle « l’ennemi »….
On comprend dès lors pourquoi les autorités de Téhéran donnent priorité à la lutte contre cette organisation. Arrestations et exécutions de leurs membres constituent un des objectifs principaux des forces de répression. Plus de 810 exécutions capitales ont eu lieu en Iran depuis le début de l’année 2025, et nombre d’entre eux étaient membre de l’OMPI.
Le récent anniversaire de la mort de Masha (Jina) Amini, a créé une anxiété particulière dans le régime et ses forces sécuritaires. Le volcan iranien par un événement inattendu, connaîtra une nouvelle éruption, ou une soudaine explosion.