Iran soulèvement

DOSSIER : Vers la prochaine révolution Iranienne (?)

Par Nader Nouri et Gérard Vespierre

Avant-propos

L’Iran, coeur géographique et politique du Moyen-Orient, fait face à de violentes agitations populaires depuis de nombreuses années. Elles ont au fil du temps, et des évènements, progressivement changé de nature.

Les premières manifestations d’ampleur sont apparues en 2009 autour d’une forte contestation politique portées par des fraudes électorales lors de l’élection présidentielle. Ce mouvement alimenté par une contestation politique ponctuelle, ne s’est pas reproduit.

Les vagues de contestation suivantes, d’une toute autre nature, survenues en 2017-18, puis 20219-20, se sont articulées autour de motivations économiques, augmentation du coût de la vie, salaires, inflation. Dans leurs motivations, elles portaient une capacité de répétition dans la mesure où le pouvoir ne montrait nulle volonté réelle, ou capacité, à redresser la situation économique. Une poursuite de la dégradation du niveau de vie des foyers iraniens ne pouvait qu’alimenter une reprise de la contestation.

La vague de l’an dernier, qui a déferlé à partir du 16 Septembre, a ouvert un troisième volet de contestation, cette fois-ci, sociétale et identitaire. L’application de règles d’inspiration religieuse à la société civile, d’un formalisme auquel la jeunesse ne s’identifie pas, ou ne s’identifie plus, en l’occurrence le port du voile obligatoire pour les femmes.

La République. Islamique d’Iran, confronté à l’ensemble de ces soulèvements, a méticuleusement employé une répression très brutale, à travers ses forces de police, ses milices Bassidji, en mobilisant même les « Gardiens de la Révolution ». La répression sanglante, a été la règle de survie appliquée par le régime, causant de très nombreux morts, des centaines l’an dernier, plus de 1.500 (dépêche Reuters, citant des sources du régime) lors des manifestations de 2019 !

Les émeutes et mouvements de 2022 n’ont pas été limités à quelques quartiers ou quelques villes mais se sont déroulées dans plus de 200 villes. Cela signifie que l’agitation fut générale, du nord au sud et de l’Est à l’Ouest du pays.

En réalité, la révolte de 2022 cumule des revendications sociétales, économiques, et in fine, politiques. Les émeutes qui se sont étendues dans le pays additionnent donc 3 niveaux de motivations. Il est pertinent de se rappeler que ce niveau politique a été atteint à travers les principaux slogans répétés par les manifestants « A bas Khomeini » et « mort au Guide ». Ce sont là des contestations ultimes et radicales du régime. On se trouve donc face à une contestation globale de la République Islamique, et cela dans la totalité du pays, de la province kurde à l’Ouest, à la province du Baloutchistan à l’Est.

Seule à nouveau une répression sanglante a pu éteindre la contestation. Mais, pour combien de temps ? Le feu ne continue-t-il pas à couver sous la cendre ? Les contestations sociétales, économiques et politiques se sont-elles éteintes ? Les éléments qui l’alimentent sont-ils toujours présents ?

Beaucoup d’autres questions se posent. Le régime est-il conscient de cette situation ? Quelles sont les forces qui agissent et accompagnent ce mouvement ? Quelle pourrait être la force politique pour succéder à la République islamique ? Quels pourraient être ses objectifs politiques ?

L’objectif de ce dossier est d’apporter le maximum de réponses à ces questions en s’appuyant sur le maximum de faits, de données, d’informations issues de l’intérieur même de l’Iran. Si une nouvelle révolution devait s’allumer et s’étendre en Iran, c’est du profond d’un peuple de 88 millions d’habitants qu’elle surviendra. Le guide suprême est entré dans sa 85ème année. Le peuple a le temps pour lui. Le peuple iranien aura le dernier mot.

nader nouri

Nader Nouri

Gérard Vespierre

Gérard Vespierre